LES BOITES NOIRES DU VOL MH 370
Le samedi 5 avril, un navire chinois a capté pendant 90 secondes un signal ultra sonore dont les caractéristiques pourraient correspondre avec celles émises par les boites noires du vol MH 370 disparu le 8 mars 2014 quelque part dans l'océan Indien avec 239 personnes à bord. Le lendemain, l'Ocean Shield, un navire de la Marine australienne participant aux recherches détectait à 65 nautiques de cette zone d'autres signaux acoustiques d'une fréquence de 37,5 kHz, fréquence très spécifique qui ne se rencontre que très peu dans le bruit de fond océanique.
Il
existe quatre principes pour transmettre à distance des signaux
sous-marins : optique, magnétique, électrique et acoustique. La
méthode optique n'est guère à retenir, hormis le laser bleu-vert
et pour certaines applications bien particulières qui en sont encore
au stade des expérimentations. Les ondes électromagnétiques (ondes
radio) se doivent d'opérer sur des fréquences très basses comme
les VLF (very low frequency) qui permettent aux submersibles en
immersion à faible profondeur de communiquer par Télétypes, ou les
ELF (extra low frequency) qui elles ne permettent qu'un débit très
lent (la transmission d'une lettre prend une dizaine de secondes).
Ces gammes de fréquence se révèlent quasiment inutilisables dans
notre domaine d'application, les ondes sonores, donc mécaniques,
sont bien mieux adaptées. Les sons émis sur une fréquence audible
(18 à 18 000 Hz) sont très bien perçus par l'oreille d'un plongeur
qui peut entendre un avion survoler l'eau, entendre de très loin les
bruits de machine d'un bâtiment, et les nageuses des ballets
nautiques s'ébattre au rythme de la musique diffusée par des
haut-parleurs étanches.
Le
son est un phénomène de nature vibratoire qui se crée et se
propage par des chocs élastiques entre les matériaux. L'oreille
perçoit un bruit lorsqu'une perturbation atteint le milieu (air,
solide, liquide) et que l'ébranlement consécutif parvient au
tympan. Lorsque les ondes sonores parviennent à l'oreille, elles
donnent une impression sensorielle qu'on appelle son, bruit ou onde
matérielle (pour la différencier des ondes radioélectriques
immatérielles). De façon générale, on peut appeler bruit toute
impression sonore qui n'est ni un son ni un accord.
Si
d'un point de vue physique le son est un ébranlement des éléments
constitutifs du milieu, ses paramètres physiques sont liés aux
paramètres physiologiques, pression et hauteur du son (grave, aigu)
ou fréquence (nombre de vibrations par seconde). Pour les longueurs
d'onde petites vis-à-vis des dimensions de notre tête (sons aigus),
il se produit une différence dans l'intensité de sons perçus par
chaque oreille (audition binaurale). Pour les grandes longueurs
d'onde (sons graves), il se perçoit une différence de phase
(intervalle de temps) entre les deux oreilles. Un son trop faible ne
provoque aucune sensation, un son trop aigu (ultrason) n'est pas
perçu, un son trop grave (infrason) ne provoque aucune sensation, un
son fort sur un son plus faible provoque un effet de masque, la durée
d'une impulsion dépend de la durée du stimulus.
On appelle acoustique sous-marine la partie de la physique qui s'occupe de l'étude des sons et de la propagation des sons en milieu aquatique, de leurs causes et des conditions dans lesquelles ils se produisent. La vitesse du son dans l'air, 337 m/sec (température de 16°C) fut déterminée dès 1822. Quand la température s'abaisse, la vitesse de propagation du son diminue, quand la température augmente, la vitesse elle aussi augmente. La vitesse du son diminue également en altitude en raison de la raréfaction de l'air. Dans l'eau, en raison des molécules plus nombreuses et plus proches les unes des autres et de l'incompressibilité du milieu, le son est très bien transmis ; on y note même un gain d'environ 40 dB par rapport à l'air. Selon la densité et la salinité de l'eau, la célérité du son varie ; 1 435 m/s pour l'eau douce et 1 512 m/sec pour l'eau de mer (Colladon et Sturm).
Pour
matérialiser l'émission d'un transducteur ultrasons, on peut
prendre l'exemple d'une pierre qui tombe dans l'eau, son choc à la
surface va repousser violemment les molécules et entraîner
l'apparition d'ondes (d'oscillations) circulaires ayant pour origine
le point de chute de la pierre. La longueur d'onde symbolisée par la
lettre grecque lambda représente la distance séparant deux mêmes
points sur une sinusoïde (distance séparant les deux crêtes d'une
ride à la surface de l'eau), la fréquence étant le nombre
d'oscillations se produisant dans une seconde. La longueur d'onde est
égale au rapport entre la vitesse et la fréquence le nombre
d'oscillations se produisant dans une seconde (l=C/fré). Ainsi, pour
le "La" qui est caractérisé par une fréquence de 435 Hz,
sa longueur d'onde dans l'air vaudra 331/435, soit 0.762 m, et dans
une eau pure la longueur de cette même fréquence sera égale à 1
470 / 435, soit 3.38 mètres. A mesure que l'on s'éloigne de la
source, l'onde s'amortit jusqu'à devenir indécelable. L'amplitude
de la vibration décroît avec la distance car l'énergie de l'onde
se répartit dans un volume qui s'accroît. Plus la fréquence est
élevée, plus l'absorption du son est grande.
Le son peut aussi venir
se "réfléchir" sur la surface, sur le fond, sur un
obstacle, et l'onde sonore cheminer par réflexions successives.
L'onde incidente (réfléchie) peut parfois interférer et entraîner
un changement soudain des conditions de propagation. Si le signal est
en phase, il se renforce, dans le cas contraire cela peut conduire à
l'extinction totale du signal. Cela nous montre les difficultés et
explicite les aléas rencontrés dans la propagation acoustique. Un
signal peut être perçu à grande distance pour ne plus l'être dans
une zone située plus proche de la source sonore.
En
approximation, l'absorption est proportionnelle au carré de la
fréquence, par contre, plus la fréquence est basse, moins elle est
directive. Il est à noter que si les sons aigus (fréquence élevée)
sont mieux perçus par l'oreille, ils se propagent bien moins que les
sons graves. La propagation des sons semble inversement
proportionnelle au carré de la distance, autrement dit, si la
distance double, le signal est 4 fois plus faible, si la distance
triple, le signal sera 9 fois plus faible. Mais en présence d'une
surface capable de réfléchir le son, cette loi empirique ne saurait
convenir, il faut tenir compte des frottements rencontrés par les
molécules qui sont la cause d'un amortissement. Pour une distance
inférieure au kilomètre on peut cependant négliger cet
amortissement, la formule se réduit à : Ir = A . Io/ r dans
laquelle Ir correspond à l'intensité sonore en watt/cm², r à la
distance en centimètres, Io l'intensité sonore rayonnée par la
source d'émission.
Les
écrans acoustiques, les courants, les variations de températures,
les bruits ambiants, voilà quelques paramètres capables d'influer
sur la qualité de la liaison. On pourrait comparer ces problèmes
avec le fading (affaiblissement, extinction) des hautes-fréquences
dans les liaisons à longue distance. A titre d'exemple, un poste
annoncé pour une portée de 500 mètres en pleine eau, verra sa
portée "tomber" à une cinquantaine de mètres en rade.
A la suite du crash du Rio-Paris, les enquêteurs français du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) avaient recommandé d'allonger de 30 à 90 jours la durée d'émission des balises fixées aux enregistreurs de vol et avaient en outre suggéré que la balise émette désormais à une fréquence plus basse de 8 à 9 KHz (boomer). «La mise en œuvre de la première recommandation n'a pas été rendue obligatoire pour le moment (par les instances de sécurité internationales) mais rien n'interdit à une compagnie de s'en doter».
La
faiblesse d'une boite noire ne réside pas seulement dans sa
robustesse mécanique (boitier en titane capable de résister à
1100°C pendant 60 minutes et à une immersion de 7 000 mètres),
mais dans son alimentation électrique qui n'est pas autonome. La
portée d'un pinger est fonction de sa puissance, mais plus le
pinger est puissant, plus il consomme d'énergie. La fiabilité
liée à l'autonomie annoncée par le constructeur est de 6 ans,
délai au-delà duquel il convient de procéder au remplacement de la
batterie (temps moyen de bon fonctionnement). Quand Airlines
avait-elle procédé au remplacement de la batterie ?
Les
boîtes noires récupérées, rien ne garantit que le CVR n'ait pas
été désactivé volontairement en tirant sur le “breaker”
(interrupteur) accessible depuis le cockpit... Dans le cas du
crash de l'appareil de la Swissair du 2 septembre 98, l'électricité
a été coupée six minutes avant le drame, si bien que les boites
noires furent inexploitables...
Dans
l'attente de leur récupération pour analyse, les raisons restent
bien mystérieuses. S'agit-il d'un acte suicidaire - d'un accès de
démence - d'un geste criminel prémédité - d'un geste politique -
d'une vengeance ? Le suicide d'un des membres du cockpit a été à
plusieurs reprises déjà envisagé comme une cause possible d'un
crash. Le 19 décembre 1997, un Boeing appartenant à la compagnie
singapourienne Silk Air assurant la liaison Singapour-Jakarta s'était
écrasé sur l'île de Sumatra, en Indonésie.
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